Quelle résilience urbaine face aux vagues de chaleur ?

Question écrite, Liège, le 25 juillet 2019

Monsieur le bourgmestre,

Cela ne fait plus de doute : en plus du combat global contre le réchauffement climatique auquel nous avons à participer de toutes nos forces, la ville doit aussi se préparer aux conséquences de ce phénomène, notamment à des vagues de chaleur qui étaient jusqu’à présent inconnues. Ces vagues de chaleur sont fortement aggravées par le phénomène de l’ilot de chaleur urbain, qui amplifie de plusieurs degrés centigrades les pics observés. Il est vraisemblable que les enfants d’aujourd’hui connaîtront régulièrement, lorsqu’ils seront adultes, des températures dépassant largement les 40 °C annoncés pour cette journée du 25 juillet. La santé voire la survie de larges parts de la population est en jeu.

Notre tissu urbain, notre culture de bâtir et d’habiter, nos horaires de vie et de travail,… ne sont pas adaptés à cette évolution rapide et il faudra du temps pour qu’ils le deviennent. Un plan d’ensemble est manifestement indispensable, associant initiative publique, encadrement règlementaire de l’action privée et stimulation de l’action collective et associative. Elle pourrait notamment concerner les aspects suivants.

  • La plantation de dizaines de milliers d’arbres dans la ville est sans doute la mesure la plus déterminante pour protéger nos concitoyens de la chaleur. Un arbre adulte est réputé avoir un effet comparable à cinq appareils de climatisation. Avec VEGA, nous avons déjà demandé à plusieurs reprises que la Ville intensifie de manière significative ses plantations et prévoie systématiquement une présence importante du végétal dans les aménagements envisagés. Nous proposons comme première étape que la Ville de Liège, se donne, cet automne, l’objectif de planter 5000 arbres sur le territoire communal, en impliquant les habitants dans ce défi.
  • Le remplacement de l’asphalte noir par des matériaux qui n’accumulent pas autant la chaleur. Je pense notamment ici aux grandes surfaces de parkings, qui devraient être (systématiquement arborées et) réalisées avec des matériaux poreux, laissant place au végétal, mais aussi aux voiries communales, pour lesquelles des alternatives existent ou aux cours de récréation, qui sont loin, pour le plus grand nombre d’entre elles, d’être aménagées de manière adaptée face à la chaleur.
  • La création de protections contre le soleil sur les places et dans les rues, permettant aux habitants de profiter de l’espace public en dépit de la chaleur. Les possibilités sont multiples : portiques, pergolas, auvents en tous genres. Les villes méditerranéennes doivent ici comme dans bien d’autres domaines nous inspirer.
  • La règlementation de l’usage de la climatisation, qui participe de façon de plus en plus significative à l’îlot de chaleur urbain (à lui seul, l’air climatisé augmente de plusieurs degrés centigrades la température extérieure dans les grandes villes du Sud des Etats-Unis, par exemple) et participent à rendre la situation encore plus intenable pour les personnes qui ne peuvent ou ne souhaitent pas recourir à ce type d’équipements. Le recours massif à l’air climatisé menace directement la santé publique et sa règlementation doit donc venir à l’ordre du jour. C’est d’autant plus vrai que l’usage de l’air climatisé, à l’exception des milieux accueillant des personnes fragiles (hôpitaux, crèches, maisons de retraite,…) ou des outils permettant une amélioration globale de la situation (l’ensemble des transports publics devraient être climatisés si l’on veut qu’ils restent attractifs pendant les vagues de chaleur), sert souvent de supplétif à une architecture mal adaptée au climat ou à l’absence des réflexes de base pour se protéger de la chaleur. Il est dès lors plus qu’urgent d’adapter notre règlement sur les bâtisses pour que les nouvelles constructions intègrent des protections contre la chaleur : isolation performante et/ou végétalisation des toitures, usage de couleurs claires sur les surfaces exposées au soleil, pare-soleils, volets extérieurs sur les façades exposées au soleil, plantes grimpantes sur les façades ensoleillées,… La promotion du puits canadien permettrait également de rafraichir les immeubles sans rejeter de la chaleur dans l’air extérieur (et à l’inverse, de pré-chauffer l’air de ventilation en hiver).
  • La végétalisation des toitures, évoquée au point précédent, constitue un outil intéressant à divers titres. La Ville d’Utrecht vient de végétaliser le toit de plusieurs centaines d’arrêts de bus. Elle propose également une aide pratique aux habitants qui souhaitent végétalisme une toiture privée. Un avenant au contrat JCDecaux est-il envisageable en ce sens ? À Madrid ou Singapour, il a même été décidé de végétaliser la toiture des bus eux-mêmes, pour réduire la chaleur à laquelle sont exposés les usagers. Les exemples se multiplient un peu partout. Et pour cause : les avantages des toitures végétalisées sont particulièrement nombreux. Ils participent au maillage biologique de la ville, qui favorise la biodiversité. Ils offrent une meilleure protection contre le soleil. Ils contribuent (un peu) à l’assainissement de l’air. Ils stockent l’eau de pluie.
  • La promotion — voire l’obligation — de l’installation de citernes à eau de pluie dans les nouvelles constructions. Ces citernes contribuent significativement à la résilience collective, en réduisant la demande sur une ressource qui tend à se raréfier. Associées aux filtres adéquats, elles contribueront à garantir l’alimentation en eau de la population si le réseau public devait ne plus être en mesure de répondre à la demande. Elles écrêtent par ailleurs la pression sur le réseau d’égouttage lors des orages — et nous savons que ceux-ci vont devenir plus fréquents, tandis que le réseau d’égouttage liégeois arrive à certains endroits à ses limites de capacité.
  • La multiplication — et l’entretien — des points d’eau publics. Actuellement, selon le site web de la Ville, à peine une douzaine de points d’eau sont disponibles, dont plusieurs sont d’ailleurs régulièrement hors service. On ne trouve ainsi aucun point d’eau public dans le parc d’Avroy, dans le parc de la Boverie, au jardin Botanique, dans le parc de la Chartreuse, dans le parc Astrid, dans le Parc de la Paix, dans le Parc Comhaire, au Skate parc de Cointe, dans le parc de la Citadelle, dans le parc Halkin, le long des très fréquentés Ravel de l’Ourthe et la ligne 38,…
  • L’extension des horaires d’ouverture des piscines publiques pendant l’été et la création, à moyen terme, d’au moins une piscine publique supplémentaire, dans le Sud de la Ville (Angleur, Guillemins ou Sclessin).
  • La mise en place de dispositifs d’information des habitants« thermomètres » de la pollution en rue, alertes sms, présence de l’info sur l’application de la ville,… — leur permettant de connaître, notamment, le niveau de pollution de l’air, afin d’adapter leurs comportements quotidiens.
  • La limitation du trafic routier lors des pics de pollution, qui sont associés aux vagues de chaleur, doit devenir automatique : interdiction du passage des poids-lourds dans la ville, limitation de la vitesse sur tous les axes à fort trafic traversant le tissu urbain, augmentation de l’offre de transport public voire circulation alternée,...

Le Collège est-il disposé à ouvrir un chantier global en ce sens et à mobiliser les moyens nécessaires ? Que pense-t-il des propositions formulées ici ?

En l’attente de vous lire, je vous adresse, Monsieur le bourgmestre, mes salutations les meilleures.

François Schreuer
Conseiller communal

 

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Les commentaires postés par les internautes


Quelle résilience urbaine face aux vagues de chaleur ?

Posté le 25 juillet 2019, par Nicole ROBAUX

URGENCE

Il est grand ,grand temps de planter , planter , planter des arbres et de ne plus les couper à tort et à travers comme le long des autoroutes et les voies de chemin de fer...
de mon côté , j’ en ai planté dans mon jardin et je les soigne du mieux que je peux...

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Quelle résilience urbaine face aux vagues de chaleur ?

Posté le 25 juillet 2019, par Delaye jean-paul

Arrêtons de couper des arbres ( 6 platanes abattus place de carmes pour permettre aux cafetiers d’avoir une plus grande terrasse chauffée !!!)
et plantons en le long de routes et sur les places !

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Quelle résilience urbaine face aux vagues de chaleur ?

Posté le 25 juillet 2019

Pour ce qui est de la réglementation de la climatisation, il faudrait néanmoins prévoir une dérogation pour les personnes fragilisées qui sont médicalement obligées de prévoir un système de climatisation A DOMICILE. C’est mon cas. Je me suis renseignée pour les alternative à un climatiseur classique qui, malgré l’isolation, est à prévoir vu la situation plein sud de la maison. Le puits canadien individuel est trop cher, la pompe à chaleur air n’est pas assez performante et le jardin est trop petit pour une pompe à chaleur avec circuit souterrain. En attendant d’encore mieux isoler le toit plat (terrasse carrelée) par végétalisation, j’ai bien dû opter pour une clim’ classique pour rafraîchir une extension.

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Mesures à envisager

Posté le 26 juillet 2019, par Dierickx Thibaud

 Enseigner comment économiser l eau à tous les citoyens.
 Enseigner/ faire gouter les plats locaux aux citoyens, qu ils évitent d acheter trop de produits polluants venant des 4 coins du monde.
 Donner des primes aux habitants végétalisant leurs façades (confer Bruxelles) et végétaliser plus de murs ce qui empêche aux murs d accumuler de la chaleur.
 Obliger chaque restaurant à servir un plat végétarien à la carte ou sanctionner si ce n est pas réalisé.
 Enfin, réduire nos activités humaines en donnant un salaire minimum à tous et toutes. Pas besoin d un dessin : tout le monde veut faire des activités non stop et c est une cause centrale à notre consommation et impacte sur l environnement. Moins on fait, mieux on se porte et sommes (ré)créatifs !
Cordialement vôtre !
Thibaud Dierickx

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