Il existe en Belgique francophone une réelle confusion entre urbanisme et architecture qui voit systématiquement la discipline architecturale s’efacer derrière l’urbanisme. Liège n’échappe pas à ce constat : il n’y a pas de politique architecturale communale.
Pourtant, historiquement et c’est particulièrement le cas en Europe, ces deux disciplines ont toujours été convoquées dans la construction de la ville. Si l’on peut considérer que l’urbanisme accompagne le développement urbain (à travers la planification) et fabrique le cadre légal de référence (règles d’urbanisme), l’architecture constitue l’ultime étape : la concrétisation tangible dans l’espace de projets privés ou publics, conçus par des architectes, parfois accompagnés de paysagistes, de bureaux d’études en ingénierie, de designers, de plasticiens... Ensemble, ils fabriquent notre environnement de tous les jours et contribuent à son rayonnement culturel.
Si un projet d’urbanisme peut être porteur de devenir pour la ville, toutes ses intentions seront réduites à néant si l’architecture qui en découle n’est pas à la hauteur des ambitions initiales. Tel est l’enjeu d’une politique architecturale à l’échelle de la ville de Liège : accompagner la construction de notre cadre de vie, au-delà de l’urbanisme.
VEGA est la première formation politique à Liège à proposer la mise en oeuvre d’une politique architecturale communale, à inscrire dans un document fondateur et dont la portée transversale doit pouvoir toucher tous les services administratifs concernés. Cette proposition tire parti des recommandations du Livre blanc de l’architecture contemporaine de 2004, s’inspire des pratiques du Maître architecte de la Région de Bruxelles-Capitale, du Vlaams Bouwmeester et du Guide pratique des marchés d’architecture de la Fédération Wallonie-Bruxelles ainsi que des expériences étrangères (relayées notamment par le Forum européen des politiques architecturales).
Le rôle de la médiation vers le grand public y sera pointé comme un enjeu démocratique fondamental. Concrètement, un espace d’exposition et de débat, établi de manière permanente, doit pouvoir être envisagé de manière à informer tout un chacun de la mise en oeuvre de cette politique, de l‘état d’avancement des projets en cours de réalisation ou projetés et de leur évolution. Nous pensons que le site du Tivoli, lieu d’émergence de la ville contemporaine avec la démolition de la cathédrale Saint-Lambert, pourrait accueillir un espace de ce type.
Le premier acte de la politique architecturale communale est de reconnaître le rôle fondamental de l’architecture pour améliorer le cadre de vie des habitants de Liège.Concrètement, il s’agira de rédiger un document synthétique définissant la politique architecturale de Liège, qui sera ensuite consultable par tous. Ses grandes lignes préconiseront le recours systématique à la mise en compétition de projets d’architecture sous la forme de « concours » (ou processus apparentés pour tous projets d’investissements publics — que ce soit dans le logement public, les transports, des infrastructures sportives, culturelles, scolaires, administratives ou encore dans les aménagements d’espaces publics — afin de faire émerger les propositions les plus en adéquation avec une amélioration significative de la qualité (du cadre) de vie des Liégeois. Il s’agit selon nous d’une mission fondamentale des pouvoirs publics.
La politique architecturale communale ne doit pas se limiter aux seuls investissements publics. Elle doit accompagner les projets de promotion immobilière à l’architecture trop souvent caricaturale, voire médiocre. Il faut un signal clair auprès des investisseurs privés : en tant qu’acteurs majeurs de la construction de la ville, vous ne pouvez limiter votre action à votre seul retour sur investissement. Au contraire, avec la mise en oeuvre d’une politique architecturale, les promoteurs doivent être capables de mettre en oeuvre des projets exemplaires, innovants, audacieux, choisis sur base de compétitions de projets. Depuis les années ’60, Liège soufre de l’absence de politique en ce domaine, et l’évolution actuelle de sites aussi emblématiques que le Cadran, Bavière, les Guillemins, la Chartreuse ou Droixhe, livrés sans ménagement au bon vouloir architectural des promoteurs immobiliers, en représente le signal le plus inquiétant.
Enfin, la durabilité doit être au coeur de ce programme. Non seulement les priorités d’investissements doivent être dictées pour des investissements publics qui profiteront d’abord aux plus fragilisés — logements et espaces publics, infrastructures scolaires, sportives et culturelles, etc. — mais aussi pour des réalisations qui ofriront, par le choix de projets exemplaires, la véritable garantie de la « durabilité » : celle de durer dans le temps et d’être demain encore au service des générations futures.